Ce matin, Fabienne et Nicolas partent vers l’ouest en motoculteur, un moyen de transport étrange et hybride qui tient de la charrue, de l’omnibus et du secoue-squelette. Le chauffeur a pris en cours de route un jeune gars sympathique et un bonze qui ressemble étrangement a une réincarnation de Fernandel dans Don Camillo… Au delà du temple où ce dernier s’arrête, le fier véhicule s’engage dans un chemin creux au bout duquel il faut faire marche arrière car il ne va pas du tout où il faut. Une paysanne amusée leur indique une vague piste qui enjambe les clôtures le long d’un ruisseau. Puis se perd dans la forêt. Obstinément, ils avancent. Une sangsue s’en prend à Nicolas. Contrairement à ce qu’il croyait, cela fait mal. Rien ne remplace l’expérience en ce qui concerne ce genre d’animaux ! Enfin, devant eux, l’entrée. Ou plutôt : les entrées, car il y en a trois ! Ils pénètrent par la plus avenante qui s’enfonce devant eux en diaclase. Au-delà d’une étroiture que Nicolas passe en premier, la galerie se poursuit. Il se prépare à avancer quand, sur le bloc juste en face de lui, il distingue une énorme araignée, sans doute 15 ou 20 cm de large, sans galéjade ! Pas égoïste du tout, il fait aussitôt part de sa découverte à Fabienne qui refuse par conséquent de le rejoindre. Entre-temps, il aperçoit une seconde bête, quasiment aussi grosse que l’autre. Téméraire mais pas courageux devant ce genre de saleté, il rebrousse chemin en faisant autant que possible attention à ne pas toucher la paroi… Peu rassurés, ils empruntent ensuite un conduit qui les mène à une deuxième diaclase. Même morphologie – les araignées en moins – qui les fait buter sur une étroiture vraiment très étroite au-delà de laquelle Nicolas ne peut aller malgré un gabarit plutôt adapté. Il y a des limites à tout… Demi-tour en faisant la topo, histoire de n’être pas venus pour rien. En réalité, la grotte n’est autre chose qu’un réseau modeste fait de diaclases parallèles parfois reliées entre elles par des passages les recoupant à angle droit.
De retour au village, ils attendent le tuk-tuk dans ce qui ressemble a une épicerie. Les gamins sont comme d’habitude émerveillés par les lampes à carbure et le maître des lieux entame avec eux une conversation en français… Il est professeur de géographie au collège du village – excusez du peu, il y a un collège de 130 élèves dans ce village de 150 foyers – et se propose de les emmener le lendemain vers une autre grotte dont ils n’arrivent pas à saisir le nom… Lorsqu’il leur demande le prix d’un casque avec acétylène, ils le fixent à 50 euros histoire de ne pas passer pour des millionnaires en goguette, et apprennent que l’enseignant gagne 200 000 kips par mois, l’équivalent de… 20 euros, et qu’il est en train de se faire construire une maison de deux mille euros ! Décidément, il y a des choses qui ont parfois du mal à passer quand on est un falang… En particulier être un millionnaire en goguette…
Le fond de la Nam Xang Nua
François, Gabriel, Geoffroy, Eric et Olivier partent en jungle pour explorer le fond de la perte de la Nam Xang Nua. Après 3 heures de marche très pénible à travers la jungle, évitant serpents et sangsues (tous n’y échapperont pas), ils atteignent le gouffre : magnifique.
Première activité : organiser le camp pour la nuit. Les hamacs sont suspendus à proximité du feu que les 2 guides vont entretenir. A 16h, ils entament leur descente du puits d’entrée de 120m pour accéder à la suite. Encadré par Eric et François, Geoffroy réalise sa première descente en cavité naturelle. Un splendide baptême spéléo ! Mais la descente a été longue et comme la suite risque de l’être encore plus, Eric et Geoffroy remontent au camp de base , lentement mais sûrement, tandis que les 3 autres poursuivent l’exploration de la cavité en équipant et en topographiant. Olivier s’explose un pouce avec le marteau à spit, ce qui donne naissance à un flot de jurons dont même un Laotien comprendrait le sens ! La fatigue se fait sentir, tout comme le froid à cause du courant d’air glissant sur les corps trempés de sueur. Plus loin, plus bas, ils sont finalement arrêtés par un ressaut de quelques mètres à peine, faute de corde supplémentaire pour l’équiper. Tant pis, la balade a été belle et ça promet pour la prochaine fois. L’actif est sec en ce moment mais à en juger par les galets et les troncs d’arbres vus sous terre, il doit agir comme une gigantesque machine à laver.
Il faut donc remonter en déséquipant au fur et à mesure. François sort le dernier vers 4h00 du matin. Malgré toute la fatigue, le sommeil est difficile à trouver, surtout à cause du froid. Olivier ne fermera pas l’œil de la nuit et ne se réchauffera qu’au petit matin près d’un bon feu de bois. Pour ceux qui ont réussi à dormir, la nuit a été courte quand même. Au petit matin, les guides rapportent de leur chasse un rat qu’ils vont préparer devant les spéléos somnolents et faire griller sur le feu. François a trouvé un objet non explosé dans le lit de la rivière, une amorce d’obus sans doute, et le prend en photo. Comme quoi, le risque UXO est omniprésent et concerne tout le monde.