Ce matin, courses au marché pour remonter au gouffre en passant par Tham Hoï. Ce soir, nous dormirons au bord du trou, et chacun emporte avec lui 4 à 6 litres d’eau. Nos sacs sont prêts et nous allons quitter la guest house quand le propriétaire vient dire à Gabriel : « Yesterday go mountain, today police ! ». Effectivement, un fonctionnaire est venu nous chercher pour l’accompagner à l’ “immigration office” nantis de nos passeports. Nous avons vraiment dû aller dans le mauvais endroit. Ban Nampin semble tabou, puisque lorsque nous demandons pourquoi il ne faut pas y aller, on n’obtient jamais de réponse. Les noms, prénoms, et qualités de chacun sont consignés dans un registre avant que nous soyons auditionnés tout à tour pour savoir quand nous sommes arrivés, ce que nous avons fait chaque jour depuis, notre emploi du temps précis de la veille, ainsi que les motifs de notre promenade et le contenu de nos sacs. Avec un accent inimitable, le zélé fonctionnaire répète « Mister Arribart told me… » et nous devons chacun notre tour confirmer ce que Yann a dit en premier. Nous avons une corde, nous avons des cartes ? C’est très dangereux pour nous, tout ça ! Il faut remettre ces objets aux autorités, c’est pour notre sécurité, pour nous éviter de faire des choses dangereuses… Si nous acceptons de leur confier les cartes, car nous en avons des copies, nous « oublions » d’apporter la seule corde encore en notre possession. En attendant, ce sont nos passeports qui restent au bureau de l’immigration et si nous voulons faire une visite en dehors de la ville, il faudra revenir au poste de police en compagnie d’un guide. Nous avons bien sûr passé sous silence le fait que nous avons laissé du matériel là haut. Nous quittons le bureau de l’immigration fort dépités et inquiets pour la suite de notre séjour dont la durée semble compromise. Nous nous sentons comme dans une prison dorée, astreints à ne pas bouger. Eh bien soit, ce sera journée bronzage au bord de la Nam Song, mais il faut tellement chaud au soleil que nous nous réfugions à l’ombre des bambous pour dormir, lire ou écrire. En fin d’après midi, Gaël et François partent à Tham Hong Yé voir avec les guides si l’un d’eux ne pourrait pas venir avec nous une ou deux journées afin de nous accompagner au gouffre. A Tham Hong Yé, nous expliquons nos déboires, et les guides nous confirment que Ban Nampin, décidément, il ne faut pas y mettre les pieds, sans jamais nous expliquer pourquoi. Il faut attendre le retour de leur chef pour avoir une réponse à notre demande. En attendant, on me tend un curieux gobelet taillé dans un bambou : le liquide est foncé, ne ressemble pas à de l’alcool et j’en bois une petite gorgée : c’est du thé. La théière est un autre morceau de bambou rempli d’eau et de feuilles de thé, bouché avec un tampon de fibres de bambou qui fait office de filtre, le tout étant déposé directement dans le feu, dispositif économique et ingénieux. Le chef revient d’une visite avec ses touristes et les négociations commencent. Tout d’abord pour deux jours sur place, mais finalement aucun guide ne veut venir, et puis dimanche il y a les élections et cela semble mal vu de se déplacer avant les élections… Malgré tout, nous obtenons un guide pour une journée, monsieur Di, alias Number One, prononcer numbeule houane, et le rendez-vous est fixé au lendemain matin à la guest house. La soirée a été consacrée à l’envoi par Internet de toutes les données topographiques collectées jusqu’à présent, au cas où le carnet topo soit confisqué par les autorités locales. Et puis cela fera une sauvegarde utile en cas de perte